ACTUALITE

Le GRIIP suit étroitement les publications concernant le PRP et la médecine régénérative

et peut réagir quand cela semble nécessaire et constructif

Réaction du GRIIP à la publication de l’étude ayant pour objectif de comparer l’efficacité du PRP à celle d’un placebo dans la gonarthrose (KSSTA 2022 Feb 2)

Voici une étude prospective, randomisée, contrôlée contre placebo, en double aveugle, multicentrique ayant pour objectif de comparer l’efficacité du PRP à celle d’un placebo dans la gonarthrose.
Les patients étaient âgés de 18 à 80 ans, avec une gonalgie unilatérale présente la plupart des jours le mois précédent, une atteinte radiographique d’arthrose Kellgren Lawrence 1 à 3 (respectivement grade 1 = 29 % vs 31,5 % ; grade 2 = 44 % vs 42,5 % ; grade 3 = 27 % vs 26%) ou une atteinte du cartilage en IRM. Ils ne devaient pas avoir eu d’injection intra-articulaire de corticoïdes dans les 3 mois ou d’AH dans les 6 mois, ni d’instabilité, d’IMC > 40 kg/cm², de maladie systémique, de diabète, d’hémopathie, d’immunodépression, d’infection, de grossesse ni d’AINS dans les 7 jours précédents l’injection.
Les patients étaient en aveugle durant les 2 premières années de l’étude. Tous les patients avaient un prélèvement sanguin pour la préparation du PRP. Une infirmière préparait la seringue cachée. Un ml était pris pour le comptage de plaquettes et de leucocytes. Le médecin injecteur était en aveugle. Une ponction articulaire (environ 1 mL) a été faite avant chaque injection. Le rythme des injections de PRP ou de placebo était de 1 par semaine 3 fois. Les AINS ou les AASAL étaient proscrits durant l’étude.

Pour la préparation du PRP : 50 ml de sang étaient prélevés. Le kit utilisé semble non commercial et identique dans les 9 centres hospitaliers. Deux centrifugations étaient réalisées pour obtenir 5 ml de PRP. La concentration moyenne de plaquettes du PRP était de 832.1 ± 269.3 x 109/L soit une concentration moyenne par rapport au sang de 4,3 fois (IC 95% 3,6- 4,5). La concentration moyenne de leucocytes du PRP étaient de 0.35 ± 0.46 x 109/L. Il s’agit donc d’un PRP pauvre en leucocytes. Les taux de facteurs de croissance PDGF, VEGF, IGF, TGFb2, et FGF étaient donnés. Le placebo était une solution saline.

Le critère principal était le WOMAC (0-96) pour une différence cliniquement pertinente de 6,4. Les critères secondaires étaient : IKDC, EVA douleur, dosages de TNF et IL-1 dans le liquide synovial, le volume du cartilage fémorotibial en IRM et les effets indésirables. Les évaluations ont été faites à 0, 3, 6, 12, 24 et 60 mois (la ponction à baseline, 6 et 12 mois et l’IRM à baseline et à la fin de l’étude). L’effectif a été calculé en amont en prenant en compte le changement attendu de WOMAC à 60 mois.

De 2014 à 2016, 644 patients (59 % de femmes) ont été randomisés : 322 dans le groupe PRP et 322 dans le groupe placebo. Il y a eu respectivement 14 et 20 patients sortis d’étude. Attention, les patients ayant eu une chirurgie ou une autre injection durant le suivi ont été exclus de l’étude, mais le nombre n’est jamais précisé (sont-ils dans les 14 et 20 « lost to follow-up » ?).

Les WOMAC total, douleur et fonction diminuent dans les 2 groupes (moins net sur la raideur ce qui est normal), mais de manière plus importante dans le groupe PRP à partir de 3 mois, et jusqu’à 48 mois (cf figure ci-dessous), de même que les autres scores. Aucune corrélation n’a été trouvée avec les facteurs démographiques ou le niveau de dégradation. A 6 mois, les taux de TNF et IL-1 avaient diminué après PRP, mais pas dans le groupe placebo. Le volume de cartilage en IRM avait diminué dans les 2 groupes, mais statistiquement moins dans le groupe PRP (∆ de 1140 mm3 (-79 ; 1320) p<0.001). Il n’y a pas eu de complication majeure.
Les points forts de cet ERC sont une très bonne méthodologie, contre placebo, sans financement industriel, avec un nombre important de patients, un vrai double aveugle maintenu sur deux ans de suivi, une caractérisation correcte du PRP, un suivi clinique prolongé à 24 mois, complété d’une étude de marqueurs biologiques et d’une étude quantitative du cartilage en IRM à 60 mois. Les points faibles sont le manque de précision sur la durée des symptômes (douleurs le mois précédent l’injection, sur le nombre de patients avec dégradation en IRM, sur une atteinte fémoropatellaire associée et sur la prise en compte des patients qui auront une autre injection ou une chirurgie.
En conclusion, dans cet ERC contre placebo, bien conduit, 3 injections hebdomadaires d’un PRP correctement caractérisé, avec une concentration en plaquettes x 4,6 et pauvre en leucocytes, ont une meilleure efficacité sur les critères cliniques à 3, 6 et 12 mois, sur les cytokines pro-inflammatoires du liquide synovial à 6 mois et sur le volume du cartilage en IRM à 5 ans, par rapport au placebo.

KSSTA 6Fev22

Jean-François Kaux – Liège, Belgique

Efficacité du PRP dans les tendinopathies

La tendinopathie est un problème majeur en médecine. Elle est causée, entre autres, par une surcharge mécanique. Elle reste un défi pour le monde médical car sa résistance fréquente aux traitements conventionnels ne promet jamais au patient une réponse favorable à la suite d’une prise en charge thérapeutique. Le développement du PRP est un nouvel espoir lorsque les traitements thérapeutiques tels que les AINS, les injections de corticostéroïdes, la rééducation excentrique, les ondes de choc, etc. ont montré leurs limites. Le PRP est obtenu par centrifugation de sang autologue afin d’obtenir une concentration de plaquettes plus élevée que dans le sang. Les plaquettes contiennent des facteurs de croissance et des cytokines qui peuvent avoir un effet anti-inflammatoire et/ou cicatrisant.

 

Martin Lamontagne – Montréal, Canada

Standardisation du PRP dans la prise en charge de l’arthrose du genou et de la hanche.

L’utilisation des injections intra-articulaires de PRP dans le traitement de la gonarthrose a considérablement augmenté au cours des dernières années. Plusieurs essais contrôlés randomisés et méta-analyses ont été réalisés, montrant la supériorité de l’injection de PRP par rapport au placebo et aux autres traitements intra-articulaires. En effet, ils sont considérés comme des traitements de première intention conformément aux dernières lignes directrices de groupes de travail (ESSKA, AAOS). Cependant, l’hétérogénéité des protocoles limite l’extrapolation de ces résultats. Vingt-cinq recommandations ont été élaborées par le GRIIP (Groupe de Recherche International sur les Injections de Plaquettes – www.griip.org), un groupe de travail multidisciplinaire international, afin d’établir une base pour la standardisation des pratiques et pour guider de futurs protocoles de recherche. Cette présentation passera en revue les principales recommandations émises par le GRIIP pour les injections de PRP dans la gonarthrose, en plus d’analyser  les données les plus récentes de la littérature sur le sujet, afin d’aider le médecin à offrir le traitement optimal à son patient.

Une forte représentation du GRIIP à l’occasion de ce rendez-vous.

J. Magalon, H. Collado, F. Michel, A. Frey, F. Eymard

Les injections de PRP dans les tendinopathies
Quelques réponses, beaucoup de questions, la messe n’est pas dite ….
Eric NOEL (LYON), Florent EYMARD (PARIS), Paul ORNETTI (DIJON), H. BARD (PARIS) au nom du GRIIP (Groupe de Recherche International sur les Injections de Plaquettes)

Communication Eric Noel PRP-TDP

Le traitement par injections de Plasma enrichi en Plaquettes (PRP) est un sujet largement débattu depuis de nombreuses années, qui met en opposition les pro et anti PRP. Il fait partie de la médecine régénérative à laquelle s’intéressent depuis de très nombreuses années les vétérinaires et les chirurgiens stomatos. Le traitement des tendinopathies dégénératives reste le parent pauvre des traitements médicaux alors que l’activité physique, qui est de plus en plus mise en avant de nos jours, est la grande pourvoyeuse de tendinopathies quel que soit le niveau d’activité physique.
Beaucoup de spécialités différentes (rhumatologues, médecins du sport, médecins de médecine physique, chirurgiens orthopédistes, radiologues interventionnels) sont concernés par le traitement des pathologies tendineuses, sans qu’il y ait toujours de consensus entre eux. Et ceci a parfois entrainé une utilisation facile, rapide, sans preuves scientifiques fortes et parfois de manière un peu excessive des injections de PRP dans le traitement des tendinopathies chroniques dégénératives. En effet, injecter du PRP dans une lésion tendineuse, c’est injecter du plasma avec une importante concentration de plaquettes, chacune contenant une grande quantité de facteurs de croissance. Les plaquettes et tous les facteurs de croissance contenu dans les quelques ccs injectés, ont un potentiel de cicatrisation in vitro et in vivo qui parait effectivement intéressant
Cependant les questions restent nombreuses avant de pouvoir faire des PRP un traitement de référence dans les tendinopathies chroniques
Depuis quelques années les publications sur leur utilisation dans les tendinopathies chroniques sont devenues légions (1), elles sont soit très enthousiastes avec souvent une méthodologie insuffisante voire discutable, soit très négatives dans le cadre d’études remplissant les critères méthodologiques tout en étant parfois éloignées de la vraie vie.
Devant cette constatation problématique, il convient d’être le plus objectif possible afin d’apporter des données et des informations indiscutables sans chercher à promouvoir ni à détruire un traitement potentiellement utile dans ce type de pathologies.
C’est avec ces objectifs que le GRIIP ((Groupe de Recherche International sur les Injections de Plaquettes) a été créé il y a 1 an maintenant.
Ce groupe est indépendant de l’industrie pharmaceutique, il est pluridisciplinaire et regroupe des praticiens émanant de 5 pays francophones.
Ses recommandations sont (2) et seront le fruit de la conjugaison de l’analyse de la littérature scientifique, des échanges interdisciplinaires sur l’utilisation des PRP et sur les résultats des études et des réflexions menées par le groupe.
Dans cette approche l’Evidence Based Médecine est bien sûr nécessaire et incontournable mais ….
Prenons l’exemple d’un article très récemment publié dans le JAMA par Kearney (3), sa méthodologie est parfaite comme ce type de revue de haut niveau l’exige et la conclusion des auteurs est sans équivoque :
« Une injection intra tendineuse de PRP comparée à une perforation sous cutanée à l’aiguille du tendon calcanéen n’améliore pas la tendinopathie chronique de la portion moyenne du tendon d’Achille, avec un recul de 6 mois. Ce traitement ne peut donc pas être recommandé dans ce type de pathologie tendineuse ». Apparemment la messe est dite !
Mais la relecture attentive de ce papier amène un certain nombre de critiques (4) qui tempèrent largement un message sans concession et qui permettent de dire qu’une synthèse un peu plus objective aurait pu être faite en proposant une autre conclusion :
« Une seule injection intra tendineuse (sans contrôle échographique et avec xylocaïne sous cutanée) de PRP fourni par le système Glo Finn (riche en leucocytes) comparée à des perforations sous cutanées à l’aiguille n’améliore pas les tendinopathies chroniques du corps du tendon d’Achille chez des patients ayant les caractéristiques suivantes :
– Age moyen 52 ans avec BMI moyen > 30
– Ancienneté moyenne des symptômes de 24 mois (14-36 mois)
– Toutes lésions échographiques confondues
– Sans recommandations spécifiques de repos puis de rééducation post-procédure.
En effet, il est très clair que ce papier très récent concerne une population très particulière de tendinopathie d’Achille et ne tient pas compte de certains éléments qui paraissent reconnues ou posent questions après plusieurs années de pratique des injections de PRP dans la vraie vie mais aussi dans l’abondante littérature:
– Il n’y a pas un mais des PRP, pour trouver le « PRP idéal » il faut absolument mieux caractériser les PRP utilisés (5) et si possible assurer leurs reproductibilité(6)
– Il n’est pas consensuel de dire que dans les tendinopathies il faut utiliser des PRP riches en leucocytes
– Il est recommandé de ne pas utiliser de xylocaïne de façon concomitante au PRP
– Il est préférable de faire des injections guidées par écho dans les tendons
– Il est très probable que les résultats varient en fonction des données échographiques (fissures, hypersignal doppler, épaissement du tendon …)
– La prise en charge d’une pathologie tendineuse doit s’accompagner d’un protocole kinésithérapique précis et d’un délai de reprise qui est après PRP de plusieurs semaines et non pas « éviter la course et la musculation pendant 1 semaine » comme cela proposé dans le papier du JAMA.
Il est donc indiscutable que concernant les injections de PRP dans les tendinopathies, nous n’avons que quelques réponses et encore beaucoup de questions.
Il est certain que le PRP ne permettra jamais de refaire un tendon normal mais qu’il est susceptible, conjointement à d’autres mesures thérapeutiques de permettre la poursuite des activités physiques indispensables à tout un chacun.
Il faut rester objectif et critique car les options thérapeutiques en matière de tendinopathies ne sont pas légions, le travail est conséquent mais passionnant.
La messe n’est pas dite, au travail !

Bibliographie
1- Fitzpatrick J, Bulsara M, Zheng MH,
The Effectiveness of Platelet-Rich Plasma in the Treatment of Tendinopathy A Meta-analysis of Randomized Controlled Clinical Trials
The American Journal of Sports Medicine, 2017, Vol. 45, No. 1, 226-33

2- Eymard F, Ornetti P, Maillet J and col, on behalf of the GRIIP
Intra articular injections of platelet rich plasma in symptomatic knee osteoarthritis: a consensus statement from French speaking experts
Knee Surg Sports Traumatol Arthrosc. 2021 Oct;29(10):3195-3210.

3- Kearney RS, Ji C, Warwick J, Parsons N, Brown J, Harrison P, Young J, Costa ML; ATM Trial Collaborators.
Effect of Platelet-Rich Plasma Injection vs Sham Injection on Tendon Dysfunction in Patients With Chronic Midportion Achilles Tendinopathy: A Randomized Clinical Trial.
Jama. 2021 Jul 13;326(2):137-144

4- Gremeaux V, Noël E, Kaux JF
Platelet-Rich Plasma Injection vs Sham Injection on Tendon Dysfunction in Patients With Chronic Midportion Achilles Tendinopathy (letter to editor)
Jama.2021 Nov 16;326(19):1974.

5- Chu CR, Rodeo S, Bhutani N, et al. Optimizing Clinical Use of Biologics in Orthopaedic Surgery: Consensus Recommendations From the 2018 AAOS/NIH U-13
Conference. J Am Acad Orthop Surg. 2019;27(2):e50-e63. doi:10.5435/JAAOS-D-18-00305
6-Magalon J, Brandin T, Francois P, et al. Technical and biological review of authorized medical devices for platelets-rich plasma preparation in the field of regenerative medicine. Platelets. 2021;32(2):200-208. doi:10.1080/09537104.2020.1832653

Réaction du GRIIP à la publication de l’étude de Bennell et al (JAMA 2021 Nov 23)
Effect of Intra-articular Platelet-Rich Plasma vs Placebo Injection on Pain and Medial Tibial Cartilage Volume in Patients With Knee Osteoarthritis: The RESTORE Randomized Clinical Trial.Bennell KL et al. JAMA. 2021

https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/34812863/

 » Cette étude est l’exemple parfait de ce qu’il faut faire pour démontrer une inefficacité apparente du PRP dans la gonarthrose : analyse à 2 mois (début d’efficacité) et à 12 mois (fin d’efficacité) sans étude intermédiaire, sans aire sous la courbe, critère d’efficacité exigeant (-40 %), 40 % de genoux avec épanchement, faible volume injecté et concentration plaquettaire probablement insuffisante, caractérisation insuffisante. Etude habillée d’une bonne méthodologie par ailleurs et d’une analyse d’effet structural discutable pour faire illusion, en terminant par une conclusion extrapolant aux PRP dans son ensemble, comme souvent et publié dans une revue prestigieuse qui ne publie que des études négatives sur le PRP !! attention aux conclusions hâtives. » 

Nous aurions pu aussi réagir à une autre publication du JAMA sur le PRP dans l’arthrose de cheville par l’équipe néerlandaise de Paget et De Vos. https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/34698782

» Cette étude bien faite, multicentrique, randomisée avec groupe placebo conduit les auteurs à une conclusion négative sur l’intérêt des injections de PRP dans l’arthrose de cheville.

Le placebo est le sérum physiologique. Le PRP est l’ Arthrex, pauvre en leucocytes. Ils ont injecté 2ml à 0 et 6 sem sous échoguidage par voie antéromédiale ou antérolatérale
Le double aveugle a été bien respecté. Le critère principal est l’EVA qui initialement devait être ≥ 40/100
48 cas vs 52 randomisés, grade 2 au minimum de la classification de van Dijk, soit 3 et 4 de Kellgren Lawrence dont
Suivi à 26 semaines. Diagnostic sur radio et clinique seulement. AINS stop 24h avant et pas pendant la durée de suivi si possible
Les points à discuter sont :
PRP non caractérisé, même s’il s’agit d’un kit connu er de la vraie vie. Il peut y avoir des disparités au sein d’un même kit.
Pas d’IRM pour vérifier la présence d’œdème osseux.
Grade élevé d’arthrose, moins favorable aux traitements type PRP ou acide hyaluronique.
Pas de prise en considération des traitements physiques associés
A noter que les auteurs reconnaissent que la littérature montre un effet modéré mais positif du PRP dans la gonarthrose,

La conclusion de cet article devrait être : « Deux injections de 2 ml du PRP Arthrex à 6 semaines d’intervalle dans des arthroses évoluées de cheville de stade 3 et 4 de KL (ou 2 et 3 de van Dijk) dont 40 % de stade IV ne font pas mieux que le placebo à 26 semaines . »